La France et l'islam

L’Islam et la France

Si l’on parle de Laïcité aujourd'hui à un quidam dans une rue, souvent cet interlocuteur vous parlera d’Islam. Sans connaître cette religion, sans connaître les liens historiques entre notre pays et le monde musulman, des jugements de valeurs sont posés avec trop souvent des à priori.

Comment éviter les raccourcis ? Comment pourrait-on éclairer les débats ?

Comment éviter les extrêmes, entre radicalisation islamiste et extrême droite xénophobe ?

Comment à travers le temps la France a-t-elle "géré" l'Islam et les autres religions dans l’espace colonial, et plus particulièrement en Algérie de 1830 à 1962 ?

Comment la France a-t-elle « géré » l’islam après les indépendances ?

Pourquoi porterais-je un focus particulier sur l’Algérie ? parce qu’elle fut la seule grande colonie de peuplement, on peut donc y porter un regard large et analytique, sur les moyens et méthodes de gestion de la question religieuse, dans des espaces considérés comme départements français.

L’attachement juridique est important car il porte intrinsèquement une vision étatique sur la différenciation établie entre les églises concordataires et l’Islam.

Dans une seconde partie, j’analyserai les choix opérés après les indépendances, comment acculturer rapidement une nouvelle religion dans un espace laïque ?

  1. Les religions en France au début du 19ème.

Quelques rappels historiques avant 1830 :

Narbonne est occupée par les « Sarrasins » de 719 à 752.

Le 25 octobre 732, Charles Martel stoppe la progression des musulmans dans le sud-ouest, lors de cette bataille le commandeur Abd el Rahman est tué.

Le 27 novembre 1095, le Pape Urbain II, lance un appel à la croisade. Le royaume participe à certaines des neuf croisades se déroulant entre 1095 et 1291.

En 1528, François premier signe un accord avec Soliman II dit le magnifique, deux objectifs un soutien réciproque contre les Habsbourg mais par ailleurs commercial avec la sublime porte.

Louis XIV puis Louis XV maintiennent la coopération économique et militaire avec Istamboul.

A l’été 1798, Bonaparte tente de coloniser l’Egypte, il se heurte à une coalition entre Anglais, Ottomans et autochtones. L’armée française capitule le 1er mars 1801.

1-a Les religions en France au début du 19ème siècle.

Pendant la révolution la constitution civile du clergé et la première séparation mettent la France au ban du catholicisme romain, on peut parler d’une phase gallicane paroxysmique. L’indépendance religieuse vis-à-vis du pape devient totale et conflictuelle, les ecclésiastiques français se divisent en deux groupes, ceux qui se soumettent aux nouvelles règles révolutionnaires, ils prêtent serment à la République et les autres qui restent fidèle à une église Catholique, apostolique et romaine. Le 13 avril 1791 le souverain pontife exprime son désaccord, son incompréhension dans son courrier « Charitas Quae » envoyé aux cardinaux, évêques, clergé et peuple français. Il soutient inconditionnellement la résistance des réfractaires et s’oppose aux idées des lumières « faites très attention à ne pas écouter les voix insidieuses de la philosophie de ce siècle. »

Le coup d’état militaire du 9 novembre 1799, installe un nouveau régime, le consulat. Rapidement la réconciliation s’effectue, Bonaparte reconnaît les états pontificaux. Le 14 mars 1800, la nomination d’un nouveau Pape, Pie VII facilite cette phase de dialogue. Des représentants des deux partis se retrouvent à Milan, pour finaliser les termes d’un accord. Joseph Bonaparte (frère du Consul) et le Cardinal Ercole Consalvi coordonnent les débats. Le 15 juillet 1801, le traité est finalisé, puis ratifié par l’ensemble des protagonistes. Dans ce texte :« Le Gouvernement de la République reconnaît que la religion catholique, apostolique et romaine, est la religion de la grande majorité des citoyens français. » dans son article 1er l’état accorde la liberté du culte « La religion catholique, apostolique et romaine, sera librement exercée en France. », par ailleurs il prendra en charge les salaires des ministres du culte. En contrepartie, l’église s’engage à respecter la république, et à ne pas être le flambeau d’une opposition politique. Le culte doit se terminer dès lors par la formule : « Domine, salvam fa Republicam – Domine salvos fac Consules. ».

Le 8 avril 1802, la loi « relative à l'organisation des Cultes » finalise les déclinaisons de mise en œuvre du concordat, mais les articles organiques n’ont pas été discuté, ils sont imposés à l’église catholique. Ces articles confortent une situation de contrôle du catholicisme par l’état, certes avec des contreparties non négligeables pour lui. Malgré les relations tumultueuses de Napoléon avec Pie VII, mise en résidence surveillée du Pape de 1809 à 1812, mais aussi réciproquement bulle d’excommunication « Quum Memoranda » en juin 1809 de Napoléon par le Pape, ce concordat vivra et sera inconditionnellement appliqué tout au long du 19ème siècle. Cette loi par ailleurs met les cultes protestants sur un pied d’égalité avec le culte catholique, dans les mêmes conditions de reconnaissance et d’exercice sur le sol de France. L’organisation en consistoires locaux et généraux, et synodes est directement intégrée dans ce texte.

Les principes même de l’article 10 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen se trouvent ainsi décliné : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi ». Globalement on peut dire qu’à compter de 1802, il n’y a plus de religion d’état, mais un catholicisme et un protestantisme de l’état français.

Quels croyants restent-ils à convaincre ? les Israélites.

Le gouvernement réfléchit : Le peuple juif est-il assimilable ? la synagogue française est-elle possible ? La révolution a permis l’émancipation individuelle, le consulat permettra-t-il l’émancipation du judaïsme ?

Le 9 février 1807, Napoléon convoque le grand Sanhédrin (71, rabbins et notables juifs), l’assemblée se devra de répondre aux douze questions posées par le ministre de l’intérieur. Entre interrogations et préjugés, les réponses apportées satisferont les politiques.

C’est ainsi que le 17 mars 1808, un décret définira les modalités d’exercice du culte israélite, de sa police intérieure et de sa représentativité. Comme dans le protestantisme, chaque département aura un consistoire, une hiérarchie locale et nationale. Un second décret promulgué le même jour impose aux Israélites alsaciens de ne plus pratiquer l’usure.

A compter de cette date tout au long du 19ème siècle, le catholicisme, les protestantismes (Augsbourg et réformé) et le judaïsme seront considérées comme les religions concordataires, ils obtiennent des libertés considérables, de culte et de conscience, un soutien financier de l’état mais en contrepartie ils devront respecter inconditionnel des institutions françaises. Ce paysage religieux français perdurera jusqu’à la promulgation de la loi de séparation, que l’on soit en république, en monarchie ou sous l’empire. Il est contractuel et signé à chaque fois par les deux parties, d’un côté par les représentants reconnus et identifiés de chacune des religions et d’autre part les plus hautes autorités de l’état.

2 – Les débuts de l’Algérie Française, la colonisation territoriale

2- a 1830, le 29 juin prise d'Alger par les troupes françaises

Le 5 juillet : une convention entre le Comte de Bourmont, Général en Chef de l'armée Française et son Altesse le Dey d'Alger, définit les conditions initiales de l'annexion, le respect semble acquis. La France s’engage à respecter les biens (commerce, industrie, propriétés), les personnes exprimant les attentions particulières portées aux femmes, mais aussi l’exercice de la religion mahométane. Le Dey, lui aussi sera libre de se retirer avec sa famille et ses richesses.

2-b Annexion, spoliation territoriale et immobilière

1830 le 8 septembre le Maréchal Clauzel, annexe par décret les biens Beylicks et Habous, on entend par Beylicks les biens appartenant à l'administration ottomane, mais aussi au Bey et aux Deys. Les biens Habous couvrent l'ensemble des institutions caritatives dédiées à la Mecque ou Médine, théoriquement inaliénable en droit musulman (dénommée aussi waqf). Les biens Melk (propriétés individuelles) et les biens Arch (propriétés tribales) ne sont pas touchées par ce premier décret, ils seront plus tard couramment mis sous séquestre puis affectés aux domaines par de nombreux biais administratifs ou répressifs. Le respect affiché pour la religion mahométane début juillet est déjà oublié, la religion musulmane doit être soumise car elle est source de révolte aux yeux de l’envahisseur, il ne sera jamais question de contrat et encore moins de concordat.

La France spolie ainsi à la fois l'administration ottomane mais surtout les fondations musulmanes. Les médersas et les Zaouias n'auront plus de moyens de subsistance, les écoles ferment, les fontaines ne sont plus gérées dans Alger, les fondouks abandonnés (fondouk : lieu de repos pour les caravanes peuvent être comparés aux relais des diligences en Europe). Le pouvoir français considère que la résistance à la colonisation s'organise avant tout dans ces centres religieux. Le 7 décembre un second décret définit et complète plus précisément les modalités de mise en œuvre de l'annexion puis de l'affectation aux domaines "français".

La soumission des indigènes passe par un appauvrissement total, la colonisation progressive par étapes ira de la spoliation, à la paupérisation, à la soumission voire la clochardisation (terme employé par Germaine Tillion, lors de son retour en Algérie en 1954). Dès les années 1830, le générale Lamoricière prendra comme principe l’anéantissement en utilisant les techniques de razzia, il faut tout voler, toutes les richesses, bijoux, argent mais aussi les moissons et l’ensemble du bétail, voire les femmes ; il conçoit que l’on ne soumettra les habitants locaux que s’ils sont mis dans un régime d’extrême pauvreté. 

Après la prise d’Alger, dès 1832, en métropole deux visions s’affrontent sur l’opportunité de garder ou de développer cette colonie potentielle. Alphonse de Lamartine choisit le camp des « Algériste », il soutient une vision civilisatrice face à la barbarie et au mahométisme. Sa pensée représentative de l’époque était alors majoritaire dans les milieux politiques. Ce regard l’emportera lors de la prise de décision du 22 juillet 1834, qui acte la mise en place d’un gouvernorat militaire en Algérie, qui devient à part entière une colonie française.

Dès la fin juillet 1830, les envahisseurs décidaient de mettre la main les plaines de la Mitidja, cette espace fertile assurait déjà sous l’empire ottoman l’autonomie vivrière d’Alger. Ce bassin agricole s’étale de Hadjout à l’ouest, jusqu’à Rouiba à l’est, Blida en est le centre, il est arrosé par de nombreux oueds descendants des montagnes environnantes. Dès l’été 1830 une première tentative d’annexion se soldera par un revers qui coutera la place du comte de Bourmont, une seconde expédition est organisée à la fin de l’automne. Cette opération militaire se caractérisera par son extrême violence ; un véritable massacre, Eugène Pélissier de Reynaud décrit les faits qui se déroulèrent vers le 27 novembre 1830 - tome 1 de son recueil les annales algériennes : « Blida était encombrée de cadavres, dont des vieillards, des femmes, des enfants autochtones et des Juifs, des gens tout à fait inoffensifs. Très peu paraissaient avoir appartenu à des gens qui eussent eu la volonté ou le pouvoir de se défendre. Après un si grand carnage, on ne trouva point d’armes sur les vaincus ». La population arabo-berbère est anéantie.

La machine coloniale est lancée, quelques mois après, le 7 avril 1832, la tribu des Ouffias subira les foudres du duc de Rovigo, le même Eugène Pélissier de Reynaud décrit encore des scènes abominables « Tout ce qui vivait fut voué à la mort. Tout ce qui pouvait être pris fut enlevé. On ne fit aucune distinction d’âge ni de sexe. Cependant, l’humanité d’un petit nombre d’officiers sauva quelques femmes et quelques enfants. ».

En décembre de cette même année, Rovigo en opposition avec de Bourmont et d’autres officiers français donne l’ordre d’envahir la mosquée Ketchaoua et de la transformer en église, il souhaite imposer par ce geste la soumission du « pouvoir » musulman.

En 1837, le Comte Sylvain Charles Valée est nommé Gouverneur Général de l’Algérie, il participe activement à la prise de Constantine, pour laquelle il obtiendra son bâton de Maréchal. Bien que l’émir Abd el Kader invoque le traité de la Tafna signé en 1837, le maréchal Valée décide d’occuper Blida et El Koléa en mai 1838. La ville deviendra rapidement une ville de garnison, les casernes y seront installées, la grande mosquée sera à partir de 1937 occupée par un hôpital militaire. La Mitidja est quasiment soumise, elle deviendra la vitrine de l’entreprise coloniale. Le 4 novembre 1840, un arrêté d’affectation des différentes mosquées de Blida est promulgué.

Pour tous ceux qui résistent, le séquestre devient systématique, pour la région de Mascara il s’agissait de sanctionner les tribus ayant rejoint Abd el Kader. Le séquestre permet donc l'appropriation par les domaines des biens indigènes pour des motifs de résistance ou de non soumission. Un des exemples ultérieurs des plus marquant fut le séquestre infligé aux tribus Kabyles, lors de la révolte des Mokrani en 1871, l’ensemble du séquestre retire 160 000 hectares de terre aux insurgés.

2-c Les autres formes d’annexion territoriales

19 novembre 1848, cet arrêté décide que les villages de colons créés ou à créer en vertu au décret du 19 septembre 1848, seront soumis au régime des territoires mixtes. Son article premier résume l’objectif de cet arrêté qui est d’annexer au profit de nouveaux colons des territoires arabes : «Art 1er - Les villages créés ou à créer sur les territoires arabes, en vertu du décret du 19 septembre 1848, ainsi que le territoire annexé à chacun d’eux, passent ou passeront, par le fait seul de l’installation des colons, de la catégorie des territoires arabes dans la catégorie des territoires mixtes et seront soumis au régime exceptionnel de ces derniers territoires ».

16 juin 1851, la loi sur la propriété en Algérie définit les prérogatives de l’état français, son article 19 liste les diverses causes autorisant les expropriations.

1852, 14 janvier, nouvelle Constitution Française définit dans son article 27

Article 27. - Le Sénat règle par un sénatus-consulte :

  1. La constitution des colonies et de l'Algérie ;
  2. Tout ce qui n'a pas été prévu par la Constitution et qui est nécessaire à sa marche ;
  3. Le sens des articles de la Constitution qui donnent lieu à différentes interprétations.

Un sénatus-consulte sous le second Empire français, c'est un acte voté par le sénat et ayant la valeur supérieure aux lois. Les sénatus-consultes organiques modifient la Constitution et les sénatus-consultes simples en règlent l'exercice, ils peuvent aussi modifier des dispositions législatives. Les différents textes sous cette appellation, ne sont pas mis en discussion à l'assemblée, ils sont étudiés et validés par le Sénat, sachant par ailleurs que l'ensemble des sénateurs sont nommés par l'Empereur.

Le Sénatus Consulte du 22 avril 1863, entame un processus de redéfinition de la propriété des différentes tribus dans les territoires occupés par les Arabes

1878, 2 décembre Circulaire du gouverneur général qui détermine la juridiction compétente pour statuer sur les questions de jouissance des terrains collectifs (arch ou sebaya). Ce texte donne tout pouvoir au gouverneur général qui statuera en conseil de gouvernement, quant à la jouissance des terrains collectifs.

3 - Gestion des religions dans l’espace colonial avant 1905

3-a Gestion des religions concordataires en Algérie coloniale

Pour toutes les religions concordataires reconnues en métropole, très rapidement il est proposé aux colons croyants d’origine européenne d’intégrer un régime identique. La reconnaissance s’appliquera progressivement en Algérie suivant le calendrier suivant :

  • Pour le culte catholique, par la bulle du 9 août 1838 (création de diocèse d'Alger) ;
  • Pour les cultes protestants, par l'ordonnance du 31 octobre 1839 ;
  • Pour le culte israélite, par l'ordonnance du 9 novembre 1845.

Ces cultes pourront se développer, création de paroisses, création d’écoles ou de séminaires, construction d’églises, d’oratoires ou de synagogues, ils tendront tous progressivement à intégrer un système équivalent à celui décliné en métropole, celui des cultes concordataires. En 1848, le 16 août, un arrêté portant sur l’administration des cultes chrétiens et israélite finalisant en acte cet état de fait, sera promulgué. Dans son article premier, la place de chaque culte y est bien définie, le culte musulman est considéré comme dangereux, il sera placé sous la tutelle du ministre de la guerre.

« Art. 1er - L’administration des cultes chrétiens, tant catholique que réformé, et du culte israélite est du ressort exclusif du Ministre des Cultes. Le culte musulman reste placé dans les attributions du Ministre de la Guerre ».

3-a-1 Gestion du culte catholique

Très rapidement après sa création, le culte catholique sera géré de la même façon que sur le territoire métropolitain. Son autonomie est reconnue par le pouvoir, il est une entité concordataire à part entière. Le grand nombre de colons d’origine italienne dans l’est algérien mais aussi d’origine espagnole dans l’ouest permettront de consolider son implantation.

Ordonnance royale relative à l’établissement d’un évêché à Alger, 25 août 1838.

1843, 16 avril Ordonnance qui autorise la Congrégation des frères de Saint-Joseph (du Mans) à fonder et à diriger des écoles dans les Possessions françaises du Nord de l’Afrique 

1846, 20 novembre, autorisation de création d'une école secondaire ecclésiastique aux environs d'Alger 

1867, 9 janvier, Création de l’archevêché d’Alger et des diocèses de Constantine et d’Oran.

3-a-2 Gestion des cultes protestants

Ordonnance sur l’organisation du culte protestant en Algérie, 1er octobre1838.

1842, 10 juillet établissement à Oran et à Dely-Ibrahim des oratoires du culte protestant 

1859, le 14 septembre Décret, portant réorganisation du culte protestant en Algérie 

1867, 12 janvier Décret qui modifie celui du 14 septembre 1859, en ce qui concerne le nombre et la composition des consistoires, la composition et le mode d’élection des conseils presbytéraux des cultes protestants

3-a-3 Gestion du culte israélite

Pour certains historiens l’arrivée des Juifs dans le Maghreb daterait entre le 8ème au 2ème siècle avant notre ère. Qui sont-ils ? Juifs berbérisés, ou Berbères judéisés ou Juifs issus de Carthage, difficile à dire. L’Afrique du nord est un carrefour, une terre d’échanges où tour à tour Phéniciens, Romains, Arabes, Turcs puis Européens s’installèrent.

Une nouvelle vague d’immigration s’opère à l’époque de la Reconquista, nombre de familles chassées de la péninsule ibérique se rendent alors principalement en l’Algérie.

Dans l’espace musulmans, les Juifs (et autres croyants issus des religions du livre) sont soumis à la dhimma, régime juridique de soumission. Les Dhimmis (personnes contraintes à la dhimma) doivent se plier à un ensemble de règles discriminatoires et variables suivant le lieu et l’époque. Ce statut fut aboli en 1830 en Algérie puis en 1912 au Maroc.

Au titre de leur culte reconnu, les juifs d’Algérie furent intégrés progressivement dans la citoyenneté française, le décret Crémieux de 1870 en sera l’aboutissement. Leurs enfants suivent un enseignement en français soit dans des écoles confessionnelle, soit dans les écoles publiques.

Ce décret fut une nouvelle source de tensions, pour les musulmans il était discriminatoire, pour les nombreux colons antisémites, il était inconcevable d’offrir ainsi une pleine nationalité à des « juifs ».

L’antisémitisme s’étalait au grand jour, en 1895 sous l’impulsion de Max Regis et de ses amis un parti « antijuif » est créé, dès 1896 de violentes manifestations sanglantes se multiplient, en 1897 un journal fait son apparition « l’antijuif ». Ses articles sont innommables.

Pendant la guerre d’Algérie, les Juifs se trouvent pris entre le marteau et l’enclume, visés par l’OAS mais aussi par le FLN, parfois aussi acteurs de l’un de ces camps. Ils n’auront pas d’autres solution que de s’exiler massivement en France en 1962 malgré leur attachement viscéral et millénaire à l’Algérie. Quelques-uns choisiront le chemin d’Israël, tout récemment constitué.

Ordonnance sur l’organisation du culte et des écoles israélites en Algérie, 9 novembre 1845

1861, le 10 juillet Décret qui confère aux consistoires israélites de l’Algérie les droits de personne civile

1861, le 4 août Décret qui fait remise gratuite aux consistoires israélites des immeubles domaniaux affectés aux cultes mosaïques.

1867, 16 septembre Décret portant réorganisation du culte israélite en Algérie 

1870 Décret (dit décret Crémieux) qui déclare citoyens français les Israélites indigènes d'Algérie, à l’époque le fait que le judaïsme soit une religion concordataire facilitera considérablement l'acceptation de ce décret par l'assemblée. Ce qui n'empêchera pas sa remise en cause régulière principalement par les colons antisémites dans les années 1900.

1871 Décret du 7 octobre, relatif aux Israélites indigènes de l’Algérie (mise en œuvre du Décret Crémieux) 

1872, 12 décembre, Décret relatif aux consistoires israélites de l’Algérie 

3-b Gestion de l’islam de 1930 à 1962

3-b-1 Administration de l’islam

Pour la religion musulmane à l’inverse des églises concordataires aucune autonomie financière et budgétaire ne sera tolérée, la France souhaite avoir la main sur les finances potentiellement suspectes. Dès le 7 mars 1840, ne sachant pas à quoi, les aumônes musulmanes servent, l’administration française impose un droit de regard sur ces collectes et la distribution qui en est faite, l’aumône ne doit en aucun cas soutenir la résistance. A compter du 23 Mars 1843, un arrêté définit que les recettes et les dépenses des établissements religieux musulmans seront rattachées au budget colonial de l’Algérie. Ces recettes et dépenses devront être visées par l’administration des Domaines. Pour finaliser la mainmise de l’administration sur les biens musulmans, le 3 octobre 1848, un arrêté réunit au domaine les immeubles appartenant aux mosquées et aux établissements religieux musulmans. Le 8 mars 1855, décision du Ministre de la guerre impose aux communes de prendre en propriété les cimetières musulmans puis d’en assurer la gestion et la police. Le 17 mai 1851, une circulaire du gouverneur général, définit l’organisation du culte musulman, la France prend en charge la rémunération des Muftis, Imams, Moudérres, Hazzabines et Muezzins. Une dotation pour frais de fonctionnement et d’entretien sera versée aux différentes mosquées. Cette organisation permet d’entretenir des relations privilégiées avec l’ensemble des religieux musulmans. Les départements assurent d’abord ces responsabilités, à compter du 23 décembre 1875 elles seront rattachées au budget des dépenses ordinaires du gouvernement général civil de l’Algérie.

Le 10 décembre 1894, Arrêté du Gouverneur Général portant sur le règlement sur le pèlerinage de la Mecque, il organise ainsi les modalités sanitaires mais aussi de police du voyage.

1880, 10 décembre, Circulaire du Gouverneur Général relative au mode de distribution des avertissements pour le recouvrement des impôts arabes .

1895, 11 septembre, Arrêté du Gouverneur Général, portant réorganisation des djemaâs dans les communes mixtes et indigènes.

3-b-2 De la police arabe, plus spécifiquement musulmane

Dès le 16 août 1841, le général Bugeaud rétablit et installe sur le long terme un bureau des affaires arabes. Il reprend une partie de la hiérarchie valide sous l’empire Ottoman, des chefs de tribus (khalife, bachaghas, aghas, Caïd) et des juges ou savants musulmans (Cheick, hakems, Muftis, Cadis). Toute cette organisation est soumise à la direction de l’état-major général, l’armée pose ainsi son autorité sur l’ensemble des indigènes. Dans un premier temps, le directeur du bureau des affaires arabes pourra valider ou non la désignation des divers représentants de la société arabe. Très vite le 12 janvier 1844, une circulaire définit les modes de nomination et de révocation des caïds, hakems et cadis, ces notables seront installés par le commandant en chef de chaque province. L’ensemble de la société arabe musulmane algérienne est contraint d’obéir docilement aux désidératas de l’armée d’occupation.

La responsabilité des opérations de police sur les populations arabes musulmanes seront déléguées aux bachaghas, aghas, caïds et cadis, le 12 février 1844 une circulaire définit le rôle de chacun. Le principe suivant est énoncé : « Les amendes ayant été imposées de temps immémorial d’après la législation musulmane, nous en maintenons le principe et l’application pour la conservation de l’ordre et de la justice ». Le montant et la répartition des amendes sont définies dans le texte. Des punitions collectives peuvent être imposées aux tribus non soumises.

hiérarchie administrative indigène

Dbprps1
Db50
Db47

Le 22 juillet 1846 une Circulaire relative aux mesures de surveillance à prendre pour empêcher les vols et s’opposer aux tentatives des fanatiques, le moindre vagabond sera potentiellement coupable de fanatisme, il est suspect de maintenir des liens avec Abd-el-Kader

Sous le gouvernement Ferry, le 28 juin 1881, cette loi confère aux Administrateurs des communes mixtes en territoire civil la répression, par voie disciplinaire, des infractions spéciales à l'Indigénat. Ce code dit « de l’indigénat » synthétise un ensemble de textes antérieurs. Il positionne le sujet en état d’infériorité permanent, elle donne un pouvoir excessif aux administrateurs qui pourront ainsi sanctionner sans possibilité de défense ou d’appel tout indigène ou tribu. Elle est déjà à l’époque en opposition totale avec les principes du droit français.

Des prorogations successives pour maintenir les grands principes du « code de l’indigénat » seront régulièrement promulgués.

Prorogation du 27 juin 1888

Prorogation du 25 juin 1890

Le 25 janvier 1895, un nouveau texte donne les Instructions du Gouverneur Général sur la surveillance politique et administrative des indigènes algériens et des musulmans étrangers 

3-b-3 Sujets, indigènes ou citoyens

14 juillet 1865 - Sénatus-consulte impérial sur l'état des personnes et la naturalisation en Algérie, définit clairement la place du citoyen français, de l’indigène musulman, de l’indigène israélite, et de l’étranger qui justifie de trois années de résidence en Algérie.

Le 24 octobre 1870, Décret sur la naturalisation des Indigènes musulmans et des étrangers résidant en Algérie, il s’agit d’un texte qui définit les modalités des demandes d’accès à la citoyenneté, seul le gouverneur général pourra se prononcer sur la validité de la demande.

Le 23 mars 1882, Loi sur l’état civil des indigènes musulmans de l’Algérie : pour la première fois un texte fixe pour objectif l’établissement d'un état concernant les indigènes musulman d’Algérie, il en définit les modalités et conditions d’inscription et de choix du nom patronymique.

Le 28 juin 1889, Une loi générale sur la Nationalité est promulguée, elle se caractérise par la continuité d’application du Sénatus-Consulte de 1865 en Algérie et du décret d’octobre 1870,   

1919 Loi du 4 février sur l'accession des indigènes de l'Algérie aux droits politiques. Cette loi a pour objectif de permettre aux combattants algériens d'obtenir la citoyenneté, mais elle entraîne la renonciation au statut personnel fondé sur la loi coranique. C'est pourquoi l'Algérien qui demande la citoyenneté française est souvent considéré comme un renégat. Elle est un incontestable progrès, mais ne concernera que très peu de personne, l’attachement au statut personnel reste trop important aux yeux de ceux qui peuvent être concernés.

1936 Projet de loi Blum-Viollette : si l’on parcourt l’exposé de motifs qui ont conduit Maurice Viollette à présenter ce projet de loi, on peut percevoir sa volonté de s’opposer à ce bloc colonial qui n’a qu’une volonté celle de garder ses privilèges. Malgré son engagement et sa connaissance des conditions de vie des indigènes, lui qui fut de 1925 à 1927 gouverneur général d’Algérie, il devra abandonner suite aux pressions de l’ensemble des élus d'Algérie.

7 mars 1944, Ordonnance relative au statut des Français musulmans d'Algérie, cette ordonnance place pour la première fois dans son article premier le principe d’égalité : « Les Français musulmans d'Algérie jouissent de tous les droits et sont soumis à tous les devoirs des Français non musulmans. Tous les emplois civils et militaires leur sont accessibles ». Malheureusement ce texte ne sera jamais réellement mis en œuvre par l'administration coloniale. 

3-b-4 L’instruction publique en Algérie, de la République Institutrice.

Dans l’Algérie coloniale, l’école est par essence un élément de tensions intenses, comme elle le fut en France pour sa laïcisation. Le combat est ici tout autre, il est celui de l’accès des indigènes à l’école publique. Les colons et le Gouvernement général d’Algérie n’auront de cesse, que de freiner, empêcher ou retarder cette scolarisation synonyme de connaissance et de révolte à leurs yeux.

Les citations des militants noirs américains pour l’accès à l’école au 19ème siècle correspondent assez bien à la vision que se font les colons algériens du savoir indigène.

Nat Turner 1831 « l’alphabétisation éveille chez les esclaves une tendance à l’insatisfaction, elle les incite à l’insurrection et à la rébellion »

Frederick Douglass en 1870 « le savoir ne convient pas à l’enfant destiné à l’esclavage ».

Dès 1830 de par l’annexion des bien Habous, par le Maréchal Clauzel, la destruction massive des établissements d’enseignement arabe et musulman devient effective. Quelques années plus tard les enfants non-européens se retrouvent exclus de l’école publique voire de tout système d’apprentissage, il faudra attendre après les années 1940 pour voir enfin se dessiner une volonté de scolariser la jeunesse indigène.

4 mars 1865, Victor Duruy Ministre de l’instruction publique propose la création d’une école normale d’instituteurs ouverte aux européens mais aussi aux indigènes, Napoléon III valide ce projet, cela permettra la création de 36 écoles arabes-françaises qui accueillent environ 1300 élèves en 1870 (les cours seront donnés en arabe le matin puis en français l’après-midi). Ces écoles seront fermées dès l’arrivée de la troisième république toute empreinte de la vision d’Ernest Renan, l’école normale, elle, restera ouverte. Les instituteurs qu’ils soient métropolitains ou locaux, européens ou indigènes seront souvent des hommes engagés pour une école unique, accueillante et laïque, après 1918 certains d’entre eux n’auront de cesse de se battre pour la scolarisation de tous.

15 août 1875, Décret portant organisation du service d’instruction publique en Algérie, les établissements pour les européens sont placés sous la direction du ministre de l’instruction publique, les écoles arabes-françaises situées en territoire militaire, et les écoles musulmanes dans toute l’Algérie, restent placées sous l’autorité du gouvernement général. Ces dernières sont si peu nombreuses que seulement à peine 1% des enfants indigènes profitent d’une scolarité élémentaire.

Gestion des écoles coraniques, le 27 juillet 1883, le Gouverneur Général place les trois madrassa, Alger, Constantine et Tlemcen sous la direction unique du recteur de l’académie d’Alger.

8 novembre 1887, Décret portant règlement d’administration publique pour l’application à l’Algérie de la loi du 30 octobre 1886, et des lois antérieures - dès son article premier le décret définit clairement les cibles visées : « l’article 1 de la loi du 16 juin 1881, sur la gratuité, la loi du 28 mars 1882 et les articles 8, 9 et 10 de la loi du 20 mars 1883 seront appliqués en Algérie, en ce qui concerne les écoles destinées aux européens», l’enseignement des indigènes ne fait encore pas parties des préoccupations de la troisième république.

Mais au printemps 1891, le Sénat envoyait une commission sénatoriale afin d’étudier les questions algériennes. Jules Ferry en est le Président, Emile Combes aura la responsabilité de rédiger deux rapports, l’un « sur l'instruction primaire des indigènes » puis un autre « sur l’enseignement supérieur musulman » (les médersas). Il dénoncera les préjugés envers les autochtones, mais aussi l'attitude des autorités locales et des colons, il souhaite la mise en place systématique de l'instruction primaire destinée aux enfants indigènes, dans le respect de leurs mœurs, de leurs croyances et de leur langue, et non par l'exportation sans adaptation de la culture française. Dès octobre 1892, un premier Décret relatif à l’enseignement primaire public et privé des indigènes de l’Algérie aurait dû ouvrir la voie vers une évolution. Malheureusement, ce décret donne la responsabilité d'ouverture des écoles indigènes aux municipalités, qui sont entièrement dirigées par les colons européens d’origine, autant dire que les freins à sa mise en œuvre seront grands et qu’il ne sera jamais réellement appliqué. Ce texte qui partait d’un bon sentiment, ne fut pas assez contraignant pour ceux qui avaient la responsabilité de le mettre en œuvre ; si l’on étudie la presse algéroise de l’époque, elle expose clairement l’opposition coloniale à ce projet sénatoriale (exemple d’article paru dans : « Les annales Algériennes, le 28 mai 1893 ayant pour titre L’enseignement primaire en Algérie : Les Écoles Indigènes ».

On pourrait critiquer le concept de deux écoles, on pourrait qualifier de « loi séparatiste », mais clairement cette proposition aurait permis d’ouvrir massivement des écoles à caractère « professionnelles » pour les enfants indigènes. Il faudra attendre 1948 pour retrouver un système scolaire légèrement intégrant se mette en place, ce fut bien trop tardivement l’unique concrétisation de notre trilogie républicaine.

Suite au rapport sénatoriale d’Emile Combes sur l’enseignement supérieur musulman, une nouvelle organisation des médersas est mise en œuvre, le 1er août 1895, un nouvel arrêté organise les modalités d’études dans les médersas et le soutien possible aux étudiantsLe souhait d’Emile Combes est de soutenir l’islam éclairé des oulémas, à ses yeux le seul compatible avec les idéaux républicains, cette vision peut être qualifiée de concordataire, il s’agissait pour lui de reconnaitre l’islam.

Dans l’entre-deux guerre, l’association des instituteurs d’origines indigènes décide lors de leur assemblée générale, réunie à Alger, le 13 et 14 avril 1922 d’éditer une revue mensuelle d’éducation sociale et coopérative, elle se nommera « la voix des humbles, pour l’évolution des indigènes par la culture française, loin des partis, loin des dogmes ». Son premier gérant, directeur sera Saïd Faci, ancien élève de l’école normale de Bouzaréah. Avec d’autres instituteurs engagés (Tahart, Zenati, Lechani), ils exprimeront leur volonté d’égalité de traitement et d’abrogation des régimes spéciaux. Ces laïques francophiles et militants ne seront jamais écoutés en encore moins entendus, le régime de Pétain interdira dès 1940, dissous l’association. Leur idéal fraternel transpirait déjà dans leur éditorial : « Le problème de la politique indigène retiendra particulièrement notre attention en raison de son extrême importance. Nous l’examinerons avec le souci de concilier les intérêts légitimes des Indigènes avec l’intérêt général et les nécessités de la souveraineté française. Nous ne cesserons pas de dénoncer les méfaits de la politique d’assujettissement et de préconiser la politique d’association et de collaboration. Européens et Indigènes sont appelés à vivre côte à côte, à entretenir des relations suivies ; pour sauvegarder leurs intérêts et leur sécurité, ils se doivent réciproquement l’estime et la confiance. Le rapprochement et la fusion des races sont, à notre avis, les facteurs essentiels de la paix et de la prospérité du pays. C’est à une œuvre de paix sociale et d’éducation civique que nous convions nos concitoyens de bonne volonté.

Pour compléter notre programme, nous ouvrirons une tribune aux groupements de petits fonctionnaires ou d’autres salariés, pour leur permettre d’exposer leurs revendications corporatives. »

4 - De 1905 à 1962, « l’application ou non » de la loi de 1905 dans l’espace colonial.

4 - La loi de séparation et des raisons de sa non application en Algérie

1905 - 9 décembre, Loi de séparation des églises et de l'état , initialement cette loi devait s’appliquer à l’Algérie et aux colonies, mais sous la pression du député radical-socialiste d’Oran, César Trouin, un amendement soumet son application extra-métropolitaine à un décret complémentaire. Il faudra attendre le 21 septembre 1907, presque deux ans pour que ce nouveau texte soit promulgué : décret d'application de la Loi de séparation des Églises et de l'État, conditions d'application en Algérie et dans les colonies. Ce texte rappelle « Vu la loi du 9 décembre 1905, concernant la séparation des Églises et de l'État, notamment l'article 43 ainsi conçu : "Des règlements d'administration publique détermineront les conditions dans lesquelles la présente loi sera applicable à l'Algérie et aux colonies " ». Deux des trois signataires de ce décret, Aristide Briand et Georges Clémenceau s'étaient pourtant préalablement engagés contre le colonialisme, on aurait pu espérer mieux de leur part, mais les républicains imprégnés des idées de Renan plièrent sans opposition véritable aux exigences du lobby colonial... À première lecture, ce texte permet l’application de la séparation sans restriction à toutes les religions présente en Algérie, mais aucun règlement d’administration public ne sera promulgué pour une application à la religion musulmane. La mise en en œuvre de ce décret sera soumis au bon vouloir des gouvernements d’Algérie, les colons n’accepte pas de positionner à un niveau d'égalité les croyants indigènes, l’égalité de traitement religieux pourrait-être le début de l’accueil des indigènes dans la citoyenneté. Ce texte sera prorogé trois fois par décret.

19 septembre 1917, décret de prorogation des conditions d'application de la loi de séparation en Algérie et dans les colonies

1917 février : « la Société des Habous et des Lieux Saints de l'Islam » voit le jour, elle fut agréée pour mener à bien les travaux et la gestion de la future Grande Mosquée de Paris. L’association, d’abord créée pour organiser le Pèlerinage à La Mecque des musulmans d’Afrique du Nord, en 2023 elle préside toujours aux destinées de l’institution. Le terme habous n’est pas choisi au hasard car il donne une dimension d’inaliénabilité de la responsabilité de gestion.

29 juin 1920, l’assemblée nationale vote à l’unanimité le projet de loi du gouvernement « en vue de la création à Paris d’un Institut musulman ». Elle est construite pour marquer la reconnaissance du pays aux musulmans morts pour la France

31 août 1922, décret de prorogation des conditions d'application de la loi de séparation en Algérie et dans les colonies.

3 juillet 1924 lettre de l'Emir Khaled au président Herriot demandant l'intégration de l'Algérie dans les lois de la République. L'émir Khaled est le petit-fils de Abd el Kadder, il mesure à quel point l'intégration dans la citoyenneté de tous les indigènes Algériens mais aussi de l'Islam dans la loi de séparation des Eglises et de l'état, permettra enfin de tendre vers plus d'égalité.

15 juillet 1926, inauguration de la grande Mosquée de Paris.

25 septembre 1932, décret de prorogation des conditions d'application de la loi de séparation en Algérie et dans les colonies

1950 Requête auprès du gouvernement Algérien de la part des Oulémas d'Algérie pour étendre l'application de la séparation au culte musulman, document extrêmement précis d'un point de vue de l'organisation pour une séparation effective

1956, le 2 mars, indépendance du Maroc puis le 20 mars indépendance de la Tunisie.

1962, le 1er juillet à son tour l'Algérie devient elle aussi indépendante.

5 - Gestion de l’islam en France à compter de 1962

A compter de ces indépendances, le discours officiel évolue progressivement pour appliquer à l’islam la loi de 1905, les deux premiers articles généralistes s'appliquent à l’ensemble des religions, mais de nombreuses questions restent en suspens :

Comment considère-t-on l’islam, une religion française ou celle de travailleurs émigrés ?

Comment financer une religion n’ayant pas de patrimoine immobilier ?

Quels seront les interlocuteurs privilégiés musulmans face à l’état ?

Comment pourra-t-elle devenir « l'Islam de France » ? etc…….

5-1 - De 1962 à 1990

Dès 1963 les harkis sont les premiers français identifiés comme musulmans, ils sont parqués comme à Bias en Lot et Garonne. Ils seront 1300 à attendre et espérer dans ce camp, officiellement nommé Centre d’Accueil des Rapatriés d’Algérie, en 1975 ils pourront commencer à organiser leur sortie.

Pour les autres musulmans vivant en France et majoritaire, ils sont par les politiques et notre société considérés comme des émigrés, à ce titre la France va s’engager dans la voie de la délégation de la responsabilité de la gestion de l’islam aux différents pays d’origine de cette population, des accords bilatéraux vont être signés avec ces états (Maroc, Algérie, Tunisie, puis plus tardivement la Turquie). C’est le début de l’islam consulaire, absurdité dans un pays laïque, nous débutons un cycle « infernal » d’où ne saurons et ne savons comment sortir. Est-ce logique de donner la responsabilité d’un culte à des pays qui affichent dans leur constitution leur attachement à une religion ou qui comme la Turquie (même si elle se déclare constitutionnellement laïque) possède une administration des affaires religieuses depuis le 3 mars 1924, nommée Diyanet İşleri Başkanlığı, chargée de l'organisation et du financement de l'islam, très éloignée de notre vision de la séparation.

A partir de 1972, le premier choc pétrolier génère des difficultés économiques synonyme de la montée du chômage. Le 27 mai 1974, Valéry Giscard d’Estaing est élu président, dès le 3 juillet de la même année décide de l’arrêt de l’immigration. Trois ans plus tard Lionel Stoléru proposera une aide au retour, cette opération se soldera par un fiasco, très peu de travailleurs profiterons de cette démarche.

La Mosquée de Paris gardera un lien indéfectible avec l’Algérie, depuis sa construction jusqu’à nos jours. Depuis 1926, la grande Mosquée a toujours été dirigée par un recteur Algérien, de Kaddour Benghabrit jusqu’à l’actuel recteur Chems-Eddine Hafiz, en passant par Ahmed Benghabrit (1954-1956), Hamza Boubakeur (1957-1982), Cheikh Abbas (1982-1989), Tedjini Haddam (1989-1992) et Dalil Boubakeur (1992-2020). En 2022, l’Algérie finance encore son fonctionnement à hauteur de 2M d’Euros, sans compter 1,7M pour ses activités cultuelles et culturelles (psalmodieurs, imams, Elco, Eile).

5-2 – de 1990 à nos jours.

1991, Pierre Joxe met en place un « Conseil de réflexion sur l’islam en France », à une question posée au sénat sur les moyens, missions et résultats, posée à l’époque, il fut répondu ceci : « Le conseil de réflexion sur l'Islam en France, composé initialement de six membres choisis en raison de leurs engagements dans des projets concrets et complété par neuf autres membres cooptés par les premiers selon le même critère, a un rôle purement consultatif. Il est appelé à donner des avis à l'administration sur des problèmes pratiques liés à l'exercice du culte musulman en France. Ses membres se sont réunis à plusieurs reprises pour étudier des dossiers techniques. Le conseil de réflexion sur l'Islam en France a été réuni en séance plénière, sous la présidence du ministre de l'intérieur, trois fois en 1990, et deux fois depuis le début de l'année 1991 jusqu'à l'audience accordée aux membres de cet organisme par M. le Président de la République, le 26 mars 1991. Outre des déclarations de portée générale, appelant en particulier à l'apaisement et à la bonne entente entre les communautés vivant en France à l'occasion de la guerre du Golfe, il a notamment formulé des propositions en matière de sépulture qui ont été prises en considération lors de l'élaboration de la circulaire du 14 février 1991 sur l'inhumation des défunts de confession musulmane, étendant à l'ensemble des populations concernées des dispositions relatives à la création de carrés confessionnels jusqu'alors réservés aux seuls Français musulmans. »

1993, premières tentatives de mise en place d’une représentation des musulmans de France, sous l’impulsion de Charles Pasqua, Ministre de l’intérieur de l’époque. La dimension directive de la démarche qui adoube la mosquée de Paris et place son Recteur, Dalil Boubakeur comme principale autorité de la communauté musulmane ne permet pas une adhésion à ce concept. La mosquée de Paris obtiendra alors la responsabilité de la délégation d’autorisation de l’abattage rituel. En janvier 1994, le conseil des sages du Conseil Consultatif des Musulmans de France valide une charte du culte musulman, engagement aux valeurs de notre République.

1995, le nouveau ministre de l’intérieur M. Jean-Louis Debré, décide d’étendre la délégation à habiliter les sacrificateurs musulmans à deux autres mosquées, celles d’Évry et de Lyon (sous influence marocaine).

1997, 23 novembre - déclaration de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur sur l'histoire des relations entre l'Etat et les religions.

2000 Suite à une consultation (l'istichara), signature le 18 janvier par les principales sensibilités musulmanes d'un texte définissant « Principes et Fondements juridiques régissant les rapports entre les pouvoirs publics et le Culte Musulman en France »

2000, 28 janvier - déclaration de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur sur l'organisation du culte musulman. 

2003, Sous l’influence du nouveau Ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy, le Conseil Français du Culte Musulman (et ses conseils régionaux) est créé en juin il sera, sur un modèle quasi concordataire, l'interlocuteur du gouvernement pour tous les problèmes liés à l'exercice du culte musulman. Il s’agit d’une association régie par la loi de 1901, placé sous l’égide du ministère de l’intérieur qui aura vocation à représenter les musulmans de France. Surtout, le CFCM doit assurer la formation des imams, une question qui revêt une importance fondamentale dans un contexte d'affrontement entre les tendances modérée et intégriste de l'islam.

Les premières élections du CFCM se tiennent en le 6 et 13 avril 2003, malgré la victoire électorale de l’UOIF, la nomination arrêtée avec un accord préalable avec l’état, de Dalil Boubakeur jette un froid sur le processus. Malgré cela très rapidement et concrètement le CFCM permet la création des aumôneries pénitentiaire, militaires puis hospitalières.

2005, 21 mars Déclaration de M. Dominique de Villepin, à propos de la création de la Fondation pour les œuvres de l'islam de France, qui sera reconnue d'utilité publique.

2015 15 juin, discours de M. Bernard Cazeneuve lors de la clôture de l'instance de dialogue avec l'Islam de France, il précisera alors son souhait de voir naître la Fondation de l'Islam de France.

2016 La Fondation de l’islam de France (FIF) est créée en 2016 pour favoriser, par des actions éducatives, culturelles et sociales, l’affirmation d’un « islam humaniste, d’un islam de France qui reconnaît les valeurs et principes de la République ». Reconnue d’utilité publique, les statuts ont été publié au Journal officiel du 6 décembre, elle fut dirigée par Jean-Pierre Chevènement puis depuis 2018 par l'islamologue réformiste Monsieur Ghaleb Bencheikh.

2016, 21 mars, Discours de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, lors de la Clôture de l’Instance de Dialogue avec l’Islam de France, Hôtel Beauvau.

2016, 12 décembreOuverture de la troisième instance de dialogue avec l’Islam de France Allocution de Monsieur Bernard Cazeneuve, Premier ministre.

2020 Le vendredi 2 octobre : Discours du Président de la République Emmanuel Macron aux Mureaux : sur le thème de la lutte contre le séparatisme 

2021 17 janvier :  5 fédérations du CFCM (sur 8) signent une "charte des principes de l'Islam de France"Elles seront suivies fin décembre 2021 par les trois fédérations réticentes qui acceptent alors de signer ce document.

2021 24 août, Loi confortant le respect des principes de la République.

5-3 – Enjeux et défis pour un islam de France indépendant et laïque

5-3-a Un islam sous influence ?

Si l’on reprend le discours d’Emmanuel Macron, du 2 octobre 2020 : « La première influence qu'on a décidée de réduire, en concertation avec les pays, c'est l'organisation même de l'Islam consulaire. Vous le savez, nous sommes un pays où nous organisions la formation des imams dans des pays étrangers, mais aussi celle de psalmodieurs que nous faisions venir de manière régulière. C'est la Turquie, le Maroc et l'Algérie qui fournissaient ces imams et ces psalmodieurs. Nous avons décidé de mettre fin à ce système, de manière totalement apaisée avec les pays d'origines. »

Mais quel en sera le financement ?

5-3-b comment s’organiser ?

La première difficulté fut celle de la représentation, l’islam n’a pas été intégré dans une démarche concordataire tout au long du 19ème, il reste complexe d’imposer aujourd’hui en tant qu’état laïque une démarche directive. De 1806 à 1808 pour le judaïsme la convocation du grand Sanhédrin avait abouti à terme à la création des consistoires départementaux et du consistoire national. Le CRIF (Conseil Représentatif des Institution Juives de France) quant à lui verra le jour dans la clandestinité, beaucoup plus tard en 1944. Ces deux eux instances différentes l’une pour le culte (les consistoires), l’autre pour les institutions juives (le CRIF), permettent un dialogue avec une communauté suivant deux dimensions distinctes.

Par ailleurs l’imamat se définit comme sacerdoce universel, pas de hiérarchie reconnue. En arabe le mot imam (إمام) est de la même famille que de mot devant (amam,  ), l’imam reste un croyant qui marche devant, celui qui montre le chemin. Sa nomination vient théoriquement de la reconnaissance de son groupe et non d’une hiérarchie.

Le CFCM s’est construit dans l’adversité et la tension, avec des pressions françaises initiales imposant la présidence de Dalil Boubakeur et de facto le pilotage privilégié de l’Algérie dans l’association, aujourd’hui cette structure survit et représente encore l’islam de France. Chaque région s’est dotée d’une antenne autonome (CRCM), un conseil des imams a été mis en place. Les batailles de pouvoir au sein du CFCM, liées aux volontés hégémoniques de l’Algérie, le Maroc et de la Turquie ont largement freiné les recherches de solutions pour une réelle création d’un islam français autonome et républicain.

En 2022 une nouvelle instance est créée le FORIF:  Le Forum de l’islam de France : une étape nouvelle dans le dialogue entre les pouvoirs publics et le culte musulman ( dossier de presse du 5 février 2022). Ce n’est pas la fonction représentative qui est avant tout recherchée mais la production de solutions pratiques et réalistes visant à faciliter l’exercice cultuel des croyants. On ne part plus du national pour faire émerger des interlocuteurs. Ce sont les territoires qui sont désormais privilégiés pour identifier les acteurs de bonne volonté, nommés « les constructifs ». Plus de cadre officiel et rigide mais un cadre informel. Dès la première séance, les participants ont présenté les premières propositions auxquelles ils sont parvenus dans les quatre groupes de travail consacrés aux aumôneries, au statut et à la formation des imams, à l’application de la loi confortant le respect des principes de la République et à la lutte contre les actes antimusulmans. Une instance pragmatique à la recherche de solution, d’un cadre et de financements.

Le jeudi 16 février 2023, le Président de la République a reçu au Palais de l’Élysée les membres du Forum de l’Islam de France.

Lancé en 2022, le Forum de l’Islam de France est une instance de dialogue direct entre les acteurs de terrain du culte musulman et les pouvoirs publics. Ses travaux s’articulent autour de quatre thématiques : 

  1. la professionnalisation et le recrutement des imams,
  2. la formation des aumôniers,
  3. le droit et la gestion des associations exerçant le culte musulman,
  4. la protection des lieux de culte musulmans.

Après avoir restitué leurs travaux, les rapporteurs de chaque groupe ont présenté au Président de la République des propositions concrètes pour améliorer l’organisation du culte en France. Cette réunion plénière a également été l'occasion de présenter l’Institut français d'islamologie, également lancé en 2022, qui a vocation à devenir le pôle d'excellence de l’étude universitaire de l’islam, en France. L'événement s'est clôturé par un discours du Président Emmanuel Macron  dans lequel il a insisté sur la lutte contre l'islamisme politique, le respect du principe de laïcité pour vivre ensemble dans la République et la nécessité de mettre rapidement en oeuvre les propositions présentées.

Tout au long de l'année 2023, des assises territoriales de l'islam de France se sont tenues dans de nombreux départements, réunissant les acteurs locaux de l'islam, elles ont travaillé autour des quatres thématiques proposées dans le cadre du Forif national. 3 guides ont été mis à la disposition des musulmans présents lors de ces travaux.

  1. GUIDE PRATIQUE LA SÉCURISATION DES LIEUX DE CULTE (FORIF)
  2. GUIDE PRATIQUE JURIDIQUE LUTTE CONTRE LES ACTES ANTIMUSULMANS (FORIF)
  3. Guide pratique relatif à l’application de la loi CRPR à destination des associations exerçant le culte musulman (édition 2023) (FORIF)

2024, 26 février le Forif se réunit de nouveau au niveau national pour un bilan des travaux et avancées, dossier de presse ministériel.

5-3-b Un islam dans le siècle ?

Des défis colossaux se présentent à cette religion, l’effort de réflexion que les théologiens et les musulmans doivent entreprendre pour interpréter les textes fondateurs de l'islam (Coran, Hadith), reste aujourd’hui incontournable. Ils devront adapter leur lecture et leur engagement au regard des principes républicains et droits humains internationaux. En un mot l’islam, peut-il vivre avec son temps ? la sécularisation est-elle possible ? La réponse de Tareq Oubrou ou de Ghaleb Bencheikh est évidemment affirmative. Il s’agit pour les musulmans d’une démarche d’ijtihad éclairé et moderne, le défi est grand mais loin d’être inaccessible.

5-3-d Enseigner l’arabe ? L’elco puis l’eile, qu’en est-il ?

Pourquoi parler de cela ? parce qu’aujourd’hui quand on exprime le vœu de développer l’enseignement de l’arabe en collège et lycée, la droite conservatrice et l’extrême droite se lève d’un seul homme, criant au scandale, certains allant jusqu’à développer des arguments du type que cela finirait à terme par soutenir l’islamisme et le terrorisme. D’autres personnes « bien-pensantes » affirment que cela développerait le communautarisme. Je crois qu’il faut questionner ces postures négatives empreintes de relent d’idéologie post-coloniale. Pour avoir eu personnellement dans ma vie professionnelle la responsabilité d’un lycée français en Tunisie, là où les élèves avaient un cursus obligatoire (arabe, anglais, lv3), je peux dire que j’ai pu mesurer la richesse de ces enseignements, et de la bi ou tri culturalité. Je peux même préciser que je n’ai jamais eu connaissance de basculement vers la radicalisation d’un de mes élèves (sur des milliers).

Qu’en est-il en réalité, l’arabe n’est pratiquement pas enseigné dans l’école française (en France). Si l’on fait la somme du nombre de postes mis aux différents concours, PLP, capes, agrégation, nous obtenons le tableau suivant, il est fort dommage de voir que l'arabe n'a que très peu de considération aux yeux de nos décideurs....

Langues 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 Total   sur  8 ans
Arabe 4 6 6 13 10 8 12 59
Chinois 12 10 10 10 10 8 7 67
Italien 19 16 20 20 20 17 29 141
 Allemand 151 150 136 186 215 205 210 1253
Espagnol 415 322 327 421 320 318 362 2485
Anglais 949 832 823 958 781 779 1019 6141

A une époque (1977) où l’on considérait que l’émigré rentrerait tôt ou tard dans son pays d’origine, il fut mis en place l’Enseignement de Langue et Culture d’Origine, proposé à 9 pays ce système permettait une animation pédagogique sympathique mais fort peu performante. J’ai assisté volontairement à l’ELCO pendant un an, quand j’étais encore proviseur adjoint, j’y ai mesuré les difficultés insurmontables du système. Premièrement il s’agit simplement 1,5h semaine placé dans les emplois du temps après la rentrée scolaire, au cours du mois de septembre, cela ne correspond pas toujours aux disponibilités des élèves volontaires. Le public accueilli varie du simple débutant à l’élève ayant acquis un bon niveau de lecture et d’écriture, la trop grande hétérogénéité des apprenants devient tout de suite insurmontable. Il s’agissait donc bien d’une animation sympathique mais surtout pas d’un enseignement. Par ailleurs les enseignants étaient des personnels consulaires, peu ou pas formés à la pédagogie, mais le plus souvent de très bonne volonté.

Aujourd’hui l’EILE (Enseignements Internationaux de Langue Etrangère) remplace l’ELCO, quelles nuances entre les deux ? d’après l’éducation nationale avec Eile, les inspecteurs de l’éducation nationale peuvent contrôler la qualité de cet enseignement. Aujourd’hui, ces enseignants, désignés par l’académie sur proposition des consulats, peuvent être inspectés comme les autres enseignants (quand on connait le taux de charge des inspecteurs, j’avoue être sceptique sur cette effectivité). Toujours d’après l’Education Nationale, l’enseignant d’EILE fait partie de l’équipe pédagogique, le directeur de l’école l’invite aux conseils des maîtres, aux conseils d’école et à toute réunion de l’équipe éducative. Quand on sait que cet enseignant intervient au minimum dans une dizaine d’établissements, il lui sera difficile d’être présent à moins qu’il ait le don d’ubiquité (voire plus). Par ailleurs ce professeur d'EILE pourra aussi s’inscrire aux actions de formation continue en langue vivante mais aussi au plan départemental de formation continue et aux animations pédagogiques de circonscription. Mais sur un site académique, il est aussi indiqué ceci pour les parents d'élèves « L’ouverture du cours EILE à la rentrée scolaire dépend du nombre de demandes reçues et de la possibilité pour le pays étranger partenaire de mettre un professeur à disposition pour assurer cet enseignement. »

ELCO puis EILE, peu d’évolution dans l’organisation mais toujours pour l'apprenant la même galère pour s'inscrire dans un cours d’arabe. Il est consternant de voir que dans un pays laïque, que pratiquement les seuls lieux d'enseignement pour cette langue restent les mosquées !...